Je fais très souvent ce constat en ce qui concerne l'accessibilité : la France a énormément de retard. Ne serait ce qu'au niveau de la mentalité, on ne peut pas dire que les français soient suffisamment sensibilisés au handicap ainsi qu'à toutes les difficultés qui en découlent. Il n'est pas rare d'être confronté à des situations compliquées où l'interlocuteur face à nous ne parle pas le même langage que nous.
J'ai pu à nouveau faire ce (triste) constat hier lors d'une discussion que j'ai eu avec une personne (un assureur, pour tout vous dire). Il était question de l'accessibilité au sens large du terme. Ce que j'ai pu entendre de la part de cette personne a mis à rude épreuve ma capacité à ne pas perdre mes moyens en voyant rouge. Non, j'ai choisi de faire preuve d'intelligence en ne réagissant pas sous la colère mais plutôt en argumentant pour lui prouver que ce qu'il avançait ne tenait pas la route. Je vous explique.
Cette discussion donc portait sur le débat qui existe en France sur le fait de devoir mettre aux normes handicapées tous les locaux recevant du public. Je précise que dans cet échange, je me positionnais en premier lieu en tant qu'architecte et donc professionnelle de la construction. Même si ma situation personnelle est bien évidemment venue compléter mon discours, vous vous en doutez bien. Revenons à nos moutons. Ce monsieur donc avançait qu'il ne voyait pas en quoi cela était une nécessité – et encore moins une priorité – de mettre son local aux normes. (Je vous dis, j'ai du faire appel à mon plus grand self control !)
J'ai d'abord été surprise d'entendre encore ce genre de choses en 2014, alors que l'on entend parler partout de l'échéance au 1er Janvier 2015 de la loi handicap. Et que je sais également que les professionnels sont bien évidemment tenus informés de cette obligation qui les concerne. J'ai donc demandé à cette personne pour quelles raisons il trouvait que ce n'est pas une priorité pour lui de mettre son local aux normes.
Vous imaginez bien qu'il a avancé l'argument financier, que cela coute trop cher de faire les travaux. Je lui ai demandé si il avait fait faire des devis pour l'aménagement de son local. La réponse était non. Donc il est voyant et sait estimer le cout des travaux sans même faire appel à des professionnels. Soit. Mais l'argument choc qui a mis à rude épreuve mes nerfs est le suivant : de toutes façons, il peut venir au domicile des personnes handicapées pour effectuer le rendez-vous, donc pas besoin de faire les travaux.
Toujours avec le plus grand calme, je lui ai expliqué en quoi cet argument n'était absolument pas recevable d'après moi. Cela a eu l'air de le surprendre par exemple que la dite personne handicapée n'a peut-être pas envie de le recevoir chez elle. Et qu'elle préférerait sans doute pouvoir se rendre dans son local, seule. Comme tout le monde, en fait. Que cette personne est un client potentiel en plus. Voire un client tout court, finalement.
Me voilà donc en train de lui expliquer que je me considère – handicap ou non – comme un citoyen au même titre que lui. Et que j'ai donc le droit de pratiquer ma ville et l'ensemble de ses lieux dans les mêmes conditions que les autres. Et que non, se dire que les personnes handicapées peuvent recevoir chez elles toutes les personnes susceptibles de leur apporter un service n'est pas une solution.
Là où je veux en venir, c'est que je trouve dommage – et surtout regrettable – en 2014 d'avoir à argumenter en quoi cette loi handicap de 2005 est plus qu'une priorité. On parle pourtant là d'une réelle question de société. La question par exemple de la place que l'on souhaite donner à la personne handicapée dans la société. Et que c'est avec ce genre de discours réducteur que la France n'avance pas. Que la France est en retard par rapport à d'autres pays.
On a – j'ai – l'impression qu'il reste encore deux catégories de français : les personnes valides d'un côté et de l'autre, les personnes en situation de handicap. Alors que j'estime que toutes ces personnes ne devraient pas être mises dans des cases mais plutôt cohabiter ensemble. Quelques soient leurs situations physiques ou personnelles d'ailleurs.
Bref, tout ça pour dire qu'il serait grand temps que les mentalités changent et que les français prennent davantage conscience de l'enjeu que peut représenter une société accessible à tous.
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Qu'en pensez-vous ? Je suis impatiente d'échanger avec vous sur ce vaste sujet...