La semaine dernière, j'ai eu une discussion très intéressante avec une amie. Lors de cette discussion, il était question d'évoquer mes difficultés au quotidien. Pour me déplacer, notamment. Sortir, au sens propre du terme. On évoquait par exemple, la difficulté de trouver un lieu accessible aux personnes en fauteuil roulant pour sortir diner ou boire un verre. Dans la ville où je vis, j'ai pu identifier au fil des années les lieux où je pouvais aisément sortir. Et tous ceux – nombreux – où je ne peux malheureusement pas me rendre car le restaurant ou le bar ont une marche – voire plusieurs – à l'entrée. Ou bien même, une fois l'entrée passée, l'espace à l'intérieur est clairement insuffisant pour circuler. Cette problématique s'applique bien évidemment à toutes les villes.
Donc quand je sors ma liste d'endroits potentiels est plutôt courte. En conséquence de quoi, je sors globalement toujours dans les mêmes restaurants, les mêmes bars. Je fais mon shopping toujours dans les magasins que je sais accessibles. Et je fuis ceux qui ne le sont pas. Parfois, je me risque à essayer un nouveau lieu, inédit, en appelant ce dit lieu pour m'assurer de son accessibilité. Bien souvent mon interlocuteur ne prend pas la mesure de l'importance de sa réponse. Se contenter de me dire que « oui, oui, il n'y a pas de problème, c'est bien accessible ». Sans comprendre qu'une simple marche suffirait à ce que je ne puisse pas rentrer. Pourtant, cela m'est déjà arrivé de réserver dans un endroit pour diner par exemple, d'avoir pris tous les renseignements nécessaires par téléphone et de me retrouver le jour J face à un restaurant clairement impraticable pour moi. Et croyez-moi, ce genre de déconvenue, on s'en passerait bien !
Je sors régulièrement en ville avec cette amie avec qui j'ai eu cette discussion. Et à chaque fois, on se tourne vers les mêmes lieux. C'est là qu'elle a pointé du doigt une chose dont je n'avais jamais réellement pris conscience : le fait que j'ai pris l'habitude de contourner le problème en ne me rendant que dans ces lieux que je sais d'avance praticables. Comme si mon monde à moi ne comportait que moitié moins de possibilités – et encore je suis gentille en parlant de moitié. Le tiers serait probablement plus juste. En fait, dans la vie, il y a ceux qui voient la bouteille à moitié vide ou à moitié pleine. Je suis visiblement de ceux qui la voient à moitié pleine, parce qu'en fait je ne me rends plus vraiment compte que mes possibilités sont réduites. Je me suis habituée. Ce n'est pas beaucoup plus compliqué que ça.
C'est là que nous avons évoqué le fait que tout cela était une question d'adaptation. Et que chacun était probablement capable de s'adapter à tout, dès l'instant où il est confronté à une difficulté. On contourne le problème et on trouve une solution. Un compromis. Ce qui rend tout potentiellement possible. C'est en ça que l'homme – au sens large – a en lui une énorme force. L'adaptation. C'est sans doute ce qui rend la vie possible, malgré les obstacles. Les barrières. Les chutes. Il s'agit peut-être d'instinct de survie, au fond. Mais selon moi, chacun est potentiellement capable de s'adapter à tout. Et je trouve ça plutôt chouette et rassurant.
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Et vous, vous en pensez quoi ?