Aujourd'hui, c'est avec une émotion toute particulière que je partage avec vous ce témoignage dans la rubrique " Raconte-moi ton histoire ". La personne à qui je laisse le clavier ce soir est une des personnes qui compte le plus pour moi. Je ne vous cache pas que, quand j'ai lu son témoignage hier soir, j'avais à peine lu deux phrases que mes yeux étaient déjà inondés de larmes. Cela a été une réelle épreuve d'aller au bout de la lecture tellement j'étais bouleversée. Ce n'est pas son genre de poser des mots sur ses sentiments alors ma surprise et mon émotion en ont été que plus grandes !
Les mots ont ce pouvoir, cette magie immenses de nous offrir l'occasion de nous confier. De parfois exprimer des choses que l'on serait incapable de dire en face. C'est d'ailleurs l'essence même de mon blog et en particulier de cette rubrique où je laisse l'opportunité à d'autres personnes de déposer des mots ici. Pour se soulager, pour se raconter et tenter de trouver un peu de paix.
Alors, je vous laisse découvrir sans attendre ce témoignage si précieux à mes yeux, en espérant qu'il vous touchera autant qu'il a pu me bouleverser. Bonne lecture !
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Tout a commencé par une relation de frère et soeur classique. On adorait se détester étant petit. Je me souviendrai toujours de la photo de vacances devant les maisons colorées sur le port de Copenhague où je ne voulais pas te prendre par l'épaule. Beurk, on fait ça avec son amoureuse, pas sa soeur !
Un premier choc, ma grande soeur est tombée à l'école et s'est cassée le bras. Mais elle n'est donc pas une super grande soeur invincible que l'on aime jalouser et détester...
Et puis, une fois l'adolescence passée, les moments difficiles avec notre petit frère et des soucis de santé, c'est ton handicap qui s'est invité tout doucement en s'insinuant petit à petit dans les photos de famille. Et un jour c'est le choc, le fauteuil roulant fait son apparition. C'est la panique, tout change et tout à coup je réalise que ma grande soeur est fragile et tout se chamboule dans ma tête : comment puis-je la protéger ? Après tout je suis plus petit et j'essaie déjà de montrer l'exemple pour mon petit frère qui me prend comme modèle. Il faudra donc être encore plus grand !
Petit à petit, je comprends que rien n'est facile pour toi alors que je peux faire tout ce que je veux. Un sentiment de culpabilité prend place et je décide de faire ce que je peux pour aider à gommer ce vilain handicap qui, en plus de ne pas vouloir partir, prend de plus en plus de place dans ta vie.
Je me souviens le support inconditionnel de ta meilleure amie à l'époque et la bouffée d'oxygène que t'offraient les visites chez elle. Et puis nouveau changement, on déménage. Loin de notre cadre si confortable et dans une maison qui est tout sauf accessible pour toi. Tu n'en verras qu'un tiers et la douche de la salle de bain du rez-de-chaussée ne facilite pas le quotidien. Démarre alors le rythme des bains du dimanche dans la salle de bain du haut et toute la logistique associée.
Saches que même si j'ai râlé et t'ai laissé attendre parfois longtemps avant de te redescendre dans ta chambre, j'étais toujours content de le faire car finalement j'avais trouvé quelque chose qui me rendait utile et compensait un peu le fait que tu ne puisses pas me courir après pour me botter les fesses.
Ensuite, il y a eu tes nombreuses maquettes pour l'école d'architecture et les nombreuses plaques de carton que je te ramenais en rentrant du lycée : inoubliable ! (en plus, aller au magasin me permettait de voir plein d'étudiantes en art !)
Et puis, c'est le divorce de papa et maman, tous un peu chamboulés. Et vient le moment de choisir où aller vivre. Tu pars vivre à côté de l'école avec ton copain et je décide d'aller avec papa pour être plus près de l'école. Puis tu te sépares de ton copain et tout bascule un dimanche après midi chez papi et mamie. Le prise de conscience de la dépendance à ton handicap est énorme. Il n'est pas possible que tu doives être dépendante du bon vouloir d'une société de transport pour passer du temps avec nous. Plan d'action, branlebas de combat et après une nuit à éplucher les annonces, une solution est envisagée. Je ne peux plus te porter sur mon dos pour aller prendre ton bain à l'étage, mais je peux te trouver une voiture bien à toi pour être autonome.
Le lendemain, coup de fil à maman et papi et mamie, il y a une solution, ils trouvent les fonds pour la rendre possible ! La semaine suivante, je prenais le train pour ramener le fruit du travail collaboratif : ta voiture ! Elle te sera offerte lors de l'anniversaire de maman, et ta réaction lorsque tu as eu les clefs est inoubliable : " des clés de voiture, qu'est-ce que vous voulez que je fasse avec ?! "
Puis, petit à petit, le temps et les rencontres font que de la distance se crée entre nous. Les études se terminent, je commence à bosser et je suis souvent en déplacements et mon absence de nombreux évènements dans la famille combinée à l'influence de ma copine font que l'on ne se connaît plus et qu'une jalousie s'installe. Tu as toute l'attention de la famille et personne ne comprend que ma vie n'est pas toujours facile, même si je n'en parle jamais.
Et un jour tout à changé. La plus belle chose qui me soit arrivée, ma petite princesse est née fin 2013. Tout change pour moi et je réalise que ma famille me manque et que j'ai besoin de partager mes moments de bonheur avec vous. Après une séparation compliquée, je retrouve le plaisir de partager du temps avec toi.
Je réalise également que le temps de la montée du bain est bien loin et qu'il te faut désormais une vraie petite armée pour t'aider au quotidien. Et ce n'est que la partie visible de l'iceberg...
Après ton diplôme obtenu, premier boulot en poche jusqu'à ce qu'un licenciement économique s'en mêle. Et pourtant, tu trouves une solution et tu vas bosser tous les jours à 1h30 de chez toi avec, entre autres, un trajet jusque la gare (même sous la pluie), cela bien sûr une fois que l'auxiliaire de vie soit arrivée à l'heure pour t'aider à te préparer, puis l'attente du TGV sur le quai, 30 minutes avant si possible, puis après le trajet, un petit tour en taxi pour enfin arriver au boulot. Un petit coup d'aide sur place pour le quotidien, et une fois la journée terminée, retour à la maison en sens inverse.
Et même si la situation est maintenant un peu plus sereine pour le boulot, tu n'as jamais abandonné. Et pour cela, même si je ne le dis pas très souvent, la pudeur sûrement, je suis hyper fier de toi ma petite grande soeur ! Et tu es la meilleure de toutes les tata didi pour ta nièce qui t'admire, même si elle ne sait pas encore que la vie de sa tata n'est pas facile.
Mais au fond je suis sûr qu'elle le sait aussi car moi j'en suis convaincu : c'est une super héros invincible ma grande soeur et je l'aime de tout mon coeur !
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