Chère S. (Tu vois, je suis encore trop polie, je tairai ton prénom),
Je me retrouve face au clavier parce que j'ai un tas de choses en tête que j'ai besoin d'exprimer. Tu es entrée dans ma vie il y a quelques mois quand je recrutais une nouvelle auxiliaire de vie pour m'aider au quotidien. À l'époque, j'ai eu l'impression que tu étais quelqu'un de sérieux, de fiable et que tu avais pigé le rôle que tu aurais à jouer auprès de moi. Là-dessus, je suis toujours très claire sur les attentes que je peux avoir d'une nouvelle aide. Tu as donc intégré l'équipe en toute connaissance de causes.
Je dois bien avouer que tu m'as bien eu. Dès les premières semaines, tu as commencé à demander à être remplacée de temps en temps. Comme je suis quelqu'un d'optimiste (ou naïve parfois, rayez la mention que vous voulez...), je n'y ai pas porté plus d'attention que ça. J'ai cru que c'était temporaire. Je me suis - méchamment - trompée.
Tu as pris cette très mauvaise habitude de prévenir à la dernière minute que tu ne viendrais pas, ne laissant que peu - ou pas - de solutions pour trouver le temps de te remplacer. Il y a donc plusieurs interventions qui n'ont pas eu lieu alors que chacune d'entre elles m'est indispensable. - Tu aimerais toi ne pas pouvoir aller aux toilettes ou ne pas pouvoir te lever le matin pour te laver car personne n'est là pour t'aider ? Non ? - Ben moi non plus figure-toi ! Pourtant, c'est arrivé. Plusieurs fois.
Et après chaque absence, tu revenais, l'air de rien, sans même des excuses ou la moindre explication. Sans même t'inquiéter de savoir si quelqu'un avait pu venir te remplacer. Je ne comprendrai jamais comment on peut agir de la sorte... Non, vraiment, ça me dépasse de faire un tel métier et de ne pas tenir compte du côté humain de la chose. - Oui, je sais, pour certaines d’entre vous, je ne suis qu’un moyen de gagner votre vie. Ni plus, ni moins. - Putain, faut vraiment que je m’y fasse ! À croire que je suis vraiment trop exigeante...
Toujours est-il que j’ai passé ces dernières semaines à m’angoisser jour et nuit de savoir si oui ou non tu serais présente le lendemain. Si quelqu'un serait là pour m’aider, si je pourrai sortir de mon lit, si je pourrai aller travailler, si je pourrai rentrer chez moi le soir. S’angoisser de cela en permanence est insupportable. Je te le dis sans sourciller, tu m’as vraiment pourri la vie. Tu as fait de mon quotidien un enfer. Un enfer où j’étais à la merci de ton choix de me faire « l’honneur » de ta présence ou non (vaut mieux en rire, hein).
Ces semaines entières à stresser en permanence ont des conséquences. Des conséquences physiques, je ne te remercie pas des insupportables douleurs au dos que je subis à cause de toi. J’ai passé un dimanche entier à pleurer toutes les larmes de mon corps tellement la douleur était intense. Mon corps a dit Stop. Stop à toute cette merde. Et puis, il y a des conséquences psychologiques. Aujourd’hui, je suis fragilisée. Nerveusement, je suis à bout. Et pourtant ceux qui me connaissent bien savent que je suis plutôt quelqu'un de solide. De fort. Mais tu m’as épuisée. Ton indifférence me donne envie de vomir, en fait.
Alors, à toi qui sais très bien transformer l'aide en danger, j’ai envie de dire de te changer de métier. Tu n’es absolument pas faite pour ça (si, si, je t’assure). Ce serait même inconscient de te laisser continuer sur cette voie. Un tel manque de professionnalisme est effrayant. Dangereux, même. Tu m’as mise en danger, tu as mis mon travail en danger. Mais tu ne l’as jamais compris et ne le comprendras jamais. Cela peut être considéré comme de la maltraitance. Maltraitance, oui. - C’est fort de sens, tu ne trouves pas ?
Depuis deux semaines maintenant, tu as été virée de mon équipe et je n’ai qu’un seul mot qui me vient à l’esprit : soulagement ! Je ne sais pas de quoi demain sera fait, mais ce dont je suis sure désormais c’est que je ne te laisserai plus me faire du mal. Non, ça c’est fini. Même si je garde des séquelles, c’est encore frais tout ça, mais je sais qu’un jour je ne me rappellerai même plus de toi. Et crois-moi, j’attends ce jour avec impatience.
Sur ce, adieu. À jamais. Tu ne feras plus de ma vie un enfer. Plus jamais. T’écrire cette lettre est pour moi l’occasion d’évacuer mes souffrances. Je vais aller mieux maintenant.
Élodie